Reporters sans frontière au chevet de PAN: « Je reste déterminé à me battre pour la liberté et celle de la presse »
De nouveau incarcéré le 20 décembre, six jours seulement après sa remise en liberté, à l’issue de plus d’un mois de prison, le journaliste sénégalais et directeur du site d’information Dakar Matin a immédiatement entamé une grève de la faim. « Très éprouvé », Pape Alé Niang a été hospitalisé samedi 24 décembre. Reporters sans Frontières (RSF) rappelle aux autorités sénégalaises qu’il est temps de clôturer son dossier et de le libérer.
Retour à la case prison, avec au surplus une hospitalisation préoccupante. Pape Alé Niang n’a eu que peu de temps pour profiter de sa liberté. Extrait de sa cellule et placé sous contrôle judiciaire le 14 décembre, deux semaines après la visite que lui a rendue en prison le secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF), Christophe Deloire, le journaliste d’investigation sénégalais a de nouveau été incarcéré le 20 décembre. Sa grève de la faim, entamée dès son retour derrière les barreaux, l’a conduit à l’Hôpital Principal de Dakar la veille de Noël. Mais il reste “fort et déterminé”, comme il l’a déclaré à RSF par l’intermédiaire de sa famille. Et “toujours prêt à se battre pour sa liberté, pour la liberté de la presse.”
« Comme je l’ai déjà fait en me rendant à Dakar le 1er décembre dernier, RSF insiste pour que Pape Alé Niang, qui a le soutien de ses consoeurs et confrères de la presse sénégalaise, soit immédiatement libéré, s’indigne Christophe Deloire, le secrétaire général de l’organisation. Si les autorités sénégalaises ne veulent pas laisser croire à l’opinion publique africaine et internationale que Pape Alé Niang est victime d’un harcèlement cruel, elles doivent clôturer son dossier, abandonner toutes les charges qui pèsent contre lui et le libérer immédiatement. »
Entrave à la liberté de presse…
La remise en liberté et le placement sous contrôle judiciaire de Pape Alé Niang étaient intervenus après plus d’un mois de détention entamée en novembre pour « divulgation d’informations de nature à nuire à la Défense nationale », « recel de documents administratifs et militaires » et « diffusion de fausses nouvelles ».
Coup de théâtre, moins d’une semaine après, le 20 décembre : dans un communiqué, le parquet de Dakar annonce que le contrôle judiciaire est « révoqué ». Argument avancé : « une violation des obligations » qui lui « faisaient défense de communiquer sous aucune forme sur les faits objets de poursuite ». Le parquet de Dakar affirme que « l’inculpé a largement contrevenu à ses obligations en abordant volontairement lors de ses lives sur Youtube les faits poursuivis » et lors desquels il a mené « des attaques injustifiées aussi bien contre une autorité de la police que contre les enquêteurs ».
Un subterfuge fallacieux de l’Etat
RSF s’est entretenu avec Me Moussa Sarr, l’un des avocats de Pape Alé Niang. Il a remis en cause le prétexte du parquet pour demander la révocation de la liberté provisoire. “Le parquet a créé un lien d’apparence entre la participation de Niang à un direct sur Youtube et son évocation du directeur général de la police nationale, alors que ces deux éléments ne faisaient aucunement partie de son dossier,”a-t-il déclaré.
La révocation du contrôle judiciaire est même perçue comme un prétexte pour empêcher le journaliste d’investigation de communiquer encore sur des activités qui gangrènent la société sénégalaise. Me Ciré Clédor Ly, un autre de ses avocats est, pour sa part, formel : Pape Alé Niang ne s’est jamais réellement exprimé publiquement sur son dossier en cours. Rien ne justifiant son arrestation, RSF appelle à la clôture de l’information judiciaire en cours ainsi qu’à une remise en liberté immédiate.
La Coordination des associations de presse (CAP) qui soutient Pape Alé Niang a également répondu au parquet en précisant que le journaliste “ n’a nullement et aucunement évoqué la procédure ni les éléments du dossier le concernant”.
L’arrestation et la détention de Pape Alé Niang a suscité une vague d’indignation tant au Sénégal qu’à l’étranger. RSF qui a pris part à toutes les manifestations de soutien au directeur du site d’information Dakar Matin a solennellement rappelé au président sénégalais Macky Sall son engagement à ne mettre aucun journaliste en prison pendant son exercice du pouvoir au Sénégal.
Le cas Niang – qui risque de se transformer en précédent lamentable – entame sérieusement la crédibilité de la parole du président sénégalais vis-à-vis de ses concitoyens et de l’opinion publique mondiale.
Le pays occupe la 73e place sur 180 au classement mondial de la liberté de la presse établi par l’organisation en 2022.
Les défenseurs des droits humains engagent le combat aux côtés du journaliste
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