La Déclaration de politique générale (DPG) présentée par le Premier ministre Ousmane Sonko marque une ambition de redéfinir les paradigmes de développement économique et social du Sénégal. Inspirée par les idéaux de souveraineté et d’autodétermination, cette stratégie vise à corriger les failles structurelles héritées de l’ère coloniale et de la mauvaise gestion des régimes passés tout en répondant aux attentes d’une population en forte croissance. En s’adossant à la Vision 2050, la DPG présente sept ruptures stratégiques : la restauration de l’ambition nationale, la planification à long terme, la culture des résultats, la participation citoyenne, la décentralisation et territorialisation des politiques publiques, l’équité et la justice, ainsi que la modernisation de l’administration publique. Ces piliers ambitionnent de répondre aux défis complexes d’un Sénégal confronté à des disparités régionales, à une économie largement informelle et à une dépendance chronique envers les importations.
Un diagnostic approfondi présente les défis majeurs auxquels le Sénégal est confronté. L’économie nationale reste dominée par un modèle d’extraction et d’exportation brute de matières premières telles que l’or, le poisson et l’arachide, sans création de valeur ajoutée significative. Avec un déficit commercial de 3 300 milliards de FCFA en 2023, équivalent à 17 % du PIB, et une croissance moyenne de seulement 3,1 % entre 1960 et 2023, le pays peine à absorber une démographie en augmentation annuelle de 2,7 %. Le modèle social, marqué par un taux de pauvreté rural de 53,3 %, reflète une éducation inadaptée avec un taux d’échec de 49,5 % au baccalauréat en 2023 et une justice perçue comme politisée. Ces éléments mettent en évidence l’urgence d’une transformation structurelle.
Le fardeau de l’héritage colonial et des échecs des régimes successifs depuis les indépendance constitue un obstacle majeur à la souveraineté économique et institutionnelle. Les infrastructures, conçues pour exporter les ressources et concentrer les activités à Dakar-Mbour-Thiès, perpétuent les inégalités régionales. Cette configuration historique a laissé des chaînes de valeur incomplètes, une résilience économique amoindrie et une absence de diversification industrielle. La DPG s’attaque donc à cette dynamique en promouvant une approche décentralisée et inclusive, axée sur la valorisation des ressources locales et l’amélioration des infrastructures territoriales.
Dans le domaine des investissements publics, la DPG propose des réformes structurelles ambitieuses. L’adoption d’un budget à base zéro d’ici 2026 constitue une rupture significative avec les pratiques traditionnelles. Ce système vise à justifier chaque dépense par son impact attendu en réduisant les inefficacités et orientant les ressources vers des projets prioritaires à impact significatif. Les partenariats public-privé (PPP) seront également révisés pour mieux partager les risques et attirer des investissements étrangers tout en garantissant l’intégrité des actifs nationaux. Cependant, l’efficacité de ces mesures dépendra de la capacité de l’administration à mettre en œuvre des outils modernes de suivi et d’évaluation.
L’accent mis sur la territorialisation des investissements répond à une double ambition : réduire les disparités régionales et renforcer l’économie locale. Des infrastructures stratégiques, telles que des routes, des systèmes d’adduction d’eau et des installations énergétiques, sont prévues pour connecter les zones rurales aux grands marchés. Les zones économiques spéciales et les agropoles, soutenues par des incitations fiscales et des investissements publics, joueront un rôle clé dans la création d’emplois et la stimulation de la production locale. Toutefois, leur succès repose sur une planification rigoureuse et une gestion équitable des ressources.
Les réformes phares évoquées dans la DPG traduisent une ambition de rupture avec les dépendances traditionnelles. Parmi celles-ci figure la rationalisation des finances publiques, avec l’audit des dépenses fiscales et la réduction des exonérations inefficaces. Une importance particulière sera accordée à la numérisation des services publics pour renforcer la transparence et l’efficacité. En matière de justice, la DPG prévoit la poursuite des Assises de la Justice et l’instauration d’une reddition des comptes systématique.
Sur le plan économique, l’élaboration d’un nouveau Code des investissements et la simplification des procédures administratives visent à attirer davantage d’investissements privés. Ces réformes, combinées à une meilleure gestion territorialisée, mettent en avant l’engagement du gouvernement du Premier ministre Ousmane Sonko à moderniser le cadre institutionnel et à promouvoir une gouvernance inclusive. La DPG reconnaît ainsi l’importance de la modernisation institutionnelle pour garantir la durabilité des réformes. L’autonomisation des collectivités locales et la création d’un système de suivi et évaluation des politiques publiques sont des éléments centraux de cette vision. Ces efforts visent à renforcer la transparence, réduire la corruption et accroître la confiance des citoyens dans les institutions.
Au total, la DPG du Premier ministre Ousmane Sonko présente une vision audacieuse et cohérente pour transformer le Sénégal en une économie résiliente et inclusive. Cependant, la réalisation de cette ambition nécessitera une exécution rigoureuse, une mobilisation efficace des ressources et une adhésion populaire aux réformes proposées. Avec une mise en œuvre coordonnée et un suivi et évaluation rigoureux, cette stratégie pourrait repositionner le Sénégal comme un modèle de développement en Afrique subsaharienne.
Dr. Abdourahmane Ba Expert en Evaluation des politiques publiques Président du mouvement ESSOR
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