
Opposition par délégation, yambar par excellence, le courage en déshérence. Par I’mDieng
De 2014 à 2024, pour notre part, les convictions se sont incarnées dans la chair, dans la voix, dans l’attitude, dans le geste de ceux qui les portaient, les patriotes. Le verbe politique était l’expression sincère d’un engagement assumé. Les tribuns se dressaient, face aux oppresseurs, pour défendre leurs idéaux, fût-ce au prix du silence, de l’emprisonnement, de l’exil ou de la mort. Ce temps-là, semble-t-il, a cédé la place à l’ère de la parole téléguidée, des accusations par procuration, de l’opposition sans visage. Oui, parce qu’aujourd’hui, l’opposition sénégalaise se dérobe. Elle vit masquée, dissimulée derrière les décors titubants d’une « presse » instrumentalisée, d’un « journalisme » dégénéré en officine d’intoxication. Elle ne parle plus, elle fait parler. Elle n’attaque plus, elle fait attaquer. Elle délègue l’injustice et sa médiocrité comme un poison que l’on administre à distance, dans l’espoir d’échapper au châtiment de la loi et au jugement de l’histoire.
Qu’ils sont nombreux, ces chroniqueurs à la langue corrompue, ces prétendus analystes dont les micros suintent l’aigreur, ces mercenaires de la désinformation dont les plateaux ne sont que des scènes où se joue la farce d’une démocratie qu’ils n’ont jamais véritablement défendue ni vécue. À travers eux, l’opposition ne cherche ni la vérité, ni le dialogue, ni la lumière. Elle veut salir, diviser, saboter, discréditer. Mais jamais elle ne s’expose, jamais elle n’assume. Elle préfère le coin confortable de la lâcheté. Parce que, oui, il faut le dire sans détour, cette opposition a perdu le courage. Le courage de défendre des idées, le courage de proposer des alternatives, le courage d’assumer les conséquences de ses actes. Elle crie à la dictature quand ses complices sont appelés à rendre compte, mais elle oublie que la première des violences, c’est de lancer des hommes en pâture, en espérant qu’ils mordent pendant qu’elle reste hors d’atteinte. C’est pitoyable.
Nous avons été des millions de Sonko. Sans peur ni hésitation. Nous avons parlé haut, quand le silence était une prison. Nous avons crié justice, quand l’injustice avait ses gendarmes. Nous avons brandi la vérité, quand elle était menacée de noyade. Ce n’était pas un homme que nous soutenions, c’était une droiture. Ce n’était pas un parti que nous défendions, c’était un principe. Ce n’était pas une ambition que nous partagions, c’était une espérance.
À ceux qui prétendent s’opposer aujourd’hui, qu’ils sachent que la politique n’est pas, ou n’est plus un jeu de marionnettes, encore moins une scène de ventriloques. Si vos convictions sont justes, dites-les. Si vos griefs sont fondés, assumez-les. Si vous croyez à ce que vous déléguez à vos porte-voix, alors prenez leur place devant les tribunaux, dans les débats, face au peuple. Et répétez ce qu’ils disent. Insultez, désinformez, et vous verrez.
Ce Sénégal, à cette ère, ne se gouvernera pas dans l’opacité. Il ne se construit plus dans le « masla ». Basta! Il se forge à ciel ouvert, sous le regard d’un peuple éveillé, mûri, affermi, averti, conscient des enjeux. Un peuple qui ne se laisse plus abuser par les mensonges, ni manipuler par les ventres affamés de revanche. Nous ne voulons pas d’une opposition de calculs, de bassesses et d’intermédiaires corrompus. Nous voulons une opposition digne, frontale, noble. Une opposition qui parle d’elle-même, qui marche sur ses pieds, qui tient sa parole comme on tient un serment. Une opposition dont les mots ne sont pas des flèches empoisonnées, mais des propositions claires, construites, légitimes et surtout sincères. Cette opposition, c’est ce peuple qui a élu ce régime. Il sait quand, comment, où et qui attaquer. Ce n’est pas ce groupe de politiciens aux méthodes anachroniques.
Cette opposition obsolète, qu’elle se taise. Parce que le bruit sans courage n’est que vacarme. Et la critique sans noblesse n’est que nuisance.
I’mDieng, écrivain africain du Sénégal
Addis Abeba, le 18 avril 2025
Average Rating